15 mai 2010
Si vous êtes en affaires, vous êtes sans doute familier avec la notion de « purification ». Pour les non-initiés, rappelons brièvement de quoi il retourne.
Le paragraphe 110.6(2.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (LIR) permet aux particuliers (excepté les fiducies) résidant au Canada tout au long d’une année d’imposition de déduire de leur revenu imposable un montant pouvant aller jusqu’à 375 000 $ lors de la vente de certaines actions. Cette déduction se nomme « déduction pour gain en capital » (DGC). Comme il s’agit d’une déduction importante, il y a des conditions strictes à respecter.
La condition la plus fondamentale est que les actions vendues doivent être des « actions admissibles de petite entreprise » (AAPE). Pour ce faire, ces actions doivent répondre à trois conditions au moment de la vente :
Certains autres critères viennent se juxtaposer lorsque des sociétés rattachées sont impliquées.
Qu’est-ce que cela signifie ? Tout simplement : une société ne peut garder trop de liquidités dans ses coffres sous peine de disqualification à cette importante déduction. Les tribunaux ont souvent considéré que « la totalité ou presque » signifie 90 %, mais ce pourcentage n’est pas fixe. Vous devez donc vous assurer qu’au moment de la vente, au moins 90 % de la juste valeur marchande des actifs de votre société sert dans l’exploitation de votre entreprise. Pour les deux années qui précèdent la vente, c’est la même chose, mais le pourcentage n’est que de 50 %.
Quels sont les défis du respect de ces critères ?
Premièrement, l’établissement de la valeur marchande des actifs, lorsqu’il s’agit d’immeubles ou de comptes de banque, est un exercice relativement facile. Cependant, d’autres éléments sont moins aisément évaluables. Un de ces éléments est l’achalandage, c’est-à-dire ce qu’on appelle communément « le nom ». C’est un actif intangible, mais qui a souvent une très grande valeur relative, particulièrement lorsqu’il contient une liste de clients.
Deuxièmement, il faut déterminer si un actif en particulier est utilisé dans l’exploitation de l’entreprise. Pour la plupart des actifs, cet exercice n’est pas très sorcier. Cependant, un compte de banque disposant d’une somme importante peut ou non être considéré comme un actif d’entreprise. C’est une question de fait. S’il s’agit d’un fonds de roulement, cela peut aller. Mais s’il s’agit de sommes qui, de toute évidence, ne seront jamais utilisées dans l’exploitation de l’entreprise, il en est autrement.
Finalement, lorsque la société est rattachée à d’autres sociétés, d’autres règles s’ajoutent et rendent complexe l’établissement de la qualification. Par exemple, si une société mère détient des actions d’une société en activité, elle peut se qualifier de deux façons :
La notion de « purification » intervient lorsqu’un actionnaire désire rendre admissibles des actions non admissibles. Le but est de sortir de la société des éléments d’actifs qui ne servent pas dans l’exploitation active d’une entreprise. Il y a plusieurs façons d’y parvenir.
Par exemple, la société peut vendre des placements, payer un dividende à ses actionnaires, payer des dettes ou des comptes fournisseurs, verser des bonis ou des allocations de retraite à ses employés, procéder au rachat d’actions, acheter (et payer) des équipements qui seront utilisés dans l’entreprise ou encore fusionner avec une autre société. L’idée est simplement de ramener les ratios aux exigences légales en diminuant les liquidités non nécessaires.
Lorsque la purification est faite, l’actionnaire peut alors disposer de ses actions et profiter ainsi de la DGC de 750 000 $ (375 000 $ imposables) s’il ne l’a pas déjà utilisée en totalité ou en partie dans le passé car il s’agit d’une déduction à vie.
Mais attention ! Le critère de 90 % doit être respecté au moment de la disposition des actions. On pourrait donc croire qu’il s’agit de respecter ce critère juste avant la disposition (purifier dans les jours ou les semaines qui précèdent la vente) !
Erreur...
Si vous effectuez une purification juste avant de vendre ses actions, non seulement ne pourriez-vous pas profiter de votre DGC, mais vous pourriez devoir payer de l’impôt sur la transaction (et même une double imposition) si le paragraphe 55(2) de la Loi de l’impôt et du revenu s’applique.
En effet, ce paragraphe complexe de la loi ne permet pas toutes les fantaisies de la part des actionnaires et fait que, dans bien des circonstances, particulièrement dans les cas où des rachats d’actions sont effectués, un dividende est réputé être versé à l’actionnaire si la transaction (ou la série de transactions) a pour but de diminuer sensiblement le gain en capital qui aurait été autrement généré.
Mon conseil… Vérifiez si votre société ne fait pas l’objet d’une purification continue. Si tel est le cas, il faudra la purifier un jour ou l’autre et si, à ce moment, la moindre erreur se glisse dans les transactions envisagées, cela risque de vous coûter très cher.
Dans un tel cas, afin d’éviter les problèmes, consultez votre fiscaliste avant qu’il ne soit trop tard... Pour éviter tout impôt lors d’une purification, il faut simplement ne pas attendre le moment où on envisage la vente de ses actions.